20 septembre 2025
Une interrogation revient à mesure de nos échanges toujours plus nombreux : « Pourquoi l’autoédition ? » La réponse tient dans le titre, mais je la développe ici.
On écrit avec son cœur autant qu’avec ses valeurs. Tous les auteurs le savent pour être d’abord lecteurs. Et, même débutants, ils subodorent que ce principe vaut aussi quand il s’agit de promouvoir leur ouvrage ou de chercher un éditeur.
J’avoue pourtant ne pas y avoir songé suffisamment. J’ai sollicité l’avis de professionnels alors que « Le Marcheur de l’aurore » n’était pas finalisé et sans correspondre à leur ligne éditoriale – à l’heure de la romance, du policier ou du format Poche en hausse constante, un conte initiatique comme premier roman dépourvu d’audience préexistante est une (trop ?) grande prise de risque financier. Ou quand la précipitation nourrit l’erreur malgré les encouragements. J’aurais pu faire appel à un agent selon le modèle anglo-saxon qui s’installe chez nous, sauf que la plupart préconisaient de les contacter avant quiconque… Raté.
Si l’autoédition ne fut donc pas mon idée première, elle devint vite un choix revendiqué en réalisant ce qu’elle enseigne : la liberté, la résilience, l’humilité au besoin – à condition de ne pas croire en certains gourous des réseaux sociaux ; la technique assurément – depuis la relecture jusqu’à la couverture en passant par la mise en page, offrant latitudes absolues et responsabilité de les assumer ; enfin, les circuits de distribution dont on ignore généralement tout. Or, plonger dans les méandres d’un marché francophone, canadien, danois, hongrois ou indien est une exploration vertigineuse.
Je pris comme guide dans ce dédale le fil de mes valeurs.
Le support vint d’emblée sur la table. Édition électronique seule ? Brochée ? Les deux ? Certains prônent le tout-numérique. Pour aimer le progrès, je n’en reste pas moins admiratif de l’artisanat. Consentir aux coûts d’une composition, d’une identité visuelle et d’une impression de qualité relève déjà d’une conviction : la belle facture reflète le respect dû aux lectrices/lecteurs qui nous consacrent un peu de leur temps, de leur curiosité comme de leur argent. C’est tout autant réaffirmer l’importance d’un objet culturel transmissible.
Va pour les deux.
Il fut ensuite question de diffusion. Sur ce point, plusieurs écrivains autopubliés ne jurent que par Amazon KDP. On peut reconnaître au géant américain son efficacité à moindres frais. La redevance reversée à l’auteur d’un livre broché se multiplie jusque par dix. Et pour cause, puisque la plateforme joue tous les rôles (imprimeur, distributeur, diffuseur, publicitaire) qu’elle concurrence par ailleurs.
Mais alors, l’autoédition pour quelle raison encore ? Diviser moins et gagner plus ? Non. Ce ne serait jamais mon souhait.
Notre monde du livre est riche de sa diversité. De ses éditeurs, critiques et journalistes, prestataires, fournisseurs, intermédiaires, et surtout, de ses libraires. Paroxysme d’un sacerdoce qui mérite notre solidarité davantage que notre sympathie.
En ne réservant pas les droits du « Marcheur de l’aurore » à un acteur mondialisé, pour les co-confier au réseau Hachette via la société Bookelis et son imprimeur en Loire-Atlantique, j’ai suivi le chemin d’une maison traditionnelle quand bien même cela constituait une antilogie mercantile dans l’autoédition (la marge s’en trouvant ramenée à 10-20% du potentiel). Mais vendre un roman n’a rien de marchand à mes yeux. C’est avant tout une passion en partage avec les lecteurs, les libraires, les intermédiaires, les fournisseurs… Vous avez compris. Une passion commune où chacun reçoit sa part en acceptant un effort dans l’intérêt de tous.
L’idée devrait nous rallier quel que soit le mode d’édition.
Il en va de notre exception culturelle française.
Question de valeurs.